LA RESTAURATION DES PLANS DU FONDS ANCIEN DES ARCHIVES MUNICIPALES DE REIMS

Une série de plans d’un grand intérêt historique

Les plans du fonds ancien constituent un ensemble homogène de 262 plans pratiquement tous du XVIIIe siècle, reflétant les préoccupations majeures des édiles de l’époque : aménagement d’espaces verts pour le loisir des habitants et l’embellissement de la ville, travaux d’urbanisme qui vont modifier l’aspect de la cité, tels que la création de la place Royale, la construction d’un réseau de fontaines publiques, l’installation de l’éclairage, la création et l’alignement de voies.
Les biens de la commune, bâtiments ou terrains, y sont souvent représentés dans le cadre de projets de modifications, de mesures d’arpentage destinées à fixer des limites de propriétés ou à régler des conflits de voisinage, tels les nombreux plans dessinant les terrains du côté de la porte de Fléchambault, où les usages de la ville (communaux) côtoyaient diverses propriétés des bénédictins de l’abbaye de Saint-Rémi.


Etat des plans avant restauration

Il s’agit en général de plans manuscrits, plus rarement de plans gravés. Il est difficile de retracer avec précision l’histoire de leur conservation mais il est certain que les conditions de conservation et de communication passées ont été défavorables.
Jusqu’en 1999, ils ont été conservés pliés dans des cartons d’archives. Associés aux documents manuscrits se rapportant à la même affaire, ils en constituaient un élément parmi les autres, sans que leur spécificité (fragilité, format particulier) soit prise en compte. Ces pratiques anciennes de conservation disparaissent aujourd’hui, les plans étant très souvent conservés à plat dans des meubles adaptés. Avant sa mise en carton d’archives, l’ensemble du fonds ancien avait été conservé dans des liasses , ce qui avait permis à la poussière de s’infiltrer.
Les plans présentaient donc des salissures importantes, des pliures et souvent des déchirures.


Conservation et restauration

La conservation se scinde en deux pratiques distinctes.
La conservation préventive consiste à agir sur les conditions environnementales du document, sans toucher à celui-ci.
Si la dégradation d’un document est en étroite corrélation avec son vieillissement et que le temps la produit inévitablement, les facteurs environnementaux accélérateurs de dégradation peuvent être nombreux : chocs, température, humidité relative, éclairage non contrôlé, poussière, pollution atmosphérique, agents chimiques ou biologiques.

La deuxième pratique, la conservation curative, se caractérise par une action directe sur les effets de la dégradation et donc sur le document : désinfection, dépoussiérage, reconditionnement.
La restauration permet d’intervenir sur le document pour lui restituer son aspect (et non son état) d’origine. Elle n’est jamais synonyme de réparation mais ralentit les dégradations et consolide l’existant. Elle a une action immédiate sur la lisibilité et la mise en valeur du document.
Les professionnels de la restauration dans leurs interventions respectent les règles pour la restauration et la reliure des documents d’archives, élaborées en 1999 par le Service technique de la Direction des archives de France.
Ces règles tiennent compte de l’évolution très rapide des techniques qui nécessitent de fréquentes mises au point sur la nature des procédés à mettre en œuvre (désinfection, désacidification, blanchissement, comblage de lacunes, recollage, renforcement, doublage…) et les matériaux à utiliser. Elles permettent par ailleurs d’harmoniser, sur le plan national, les méthodes de traitement des documents.
Cinq grands principes en matière de restauration constituent une véritable charte pour les professionnels : respect des techniques anciennes, sincérité de la restauration qui doit restituer avec fidélité l’aspect du document original tout en restant décelable, intervention minimaliste limitée sur le papier, compatibilité des matériaux avec les matières anciennes (utilisation de produits non acides et non destructeurs, de matériaux durables et permanents), réversibilité (les matériaux utilisés doivent pouvoir être retirés si on constatait à terme leur nocivité ou si de nouveaux procédés ou matériaux plus adaptés verraient à être découverts dans les années à venir).


La campagne de restauration des plans

Les interventions sur les plans du fonds ancien ont été menées entre 2000 et 2002.
Elles ont été confiées à des entreprises spécialisées car une restauration requiert, outre une formation spécifique, des équipements particuliers.
Parmi ces interventions, le dépoussiérage a été systématique. Une fois déposées sur les documents, poussières et saletés deviennent en effet le nid de réactions chimiques nocives. Dans ce mélange chimique, on trouve les spores d’un nombre incalculable de moisissures, champignons et autres micro-organismes. Le dépoussiérage a été effectué par brossage ou par gommage à l’aide d’une gomme non abrasive. Les autres interventions pratiquées dépendaient de l’état du document concerné : désinfection en autoclave à l’oxyde d’éthylène (produit à la fois fongicide, bactéricide et insecticide), désacification (immersion dans une solution d’hydroxyde de calcium après test de solubilité des encres), mise à plat du papier (humidification et mise sous presse entre deux buvard), enlèvement d’adhésifs ou désentoilage à l’aide de solvants appropriés, renfort local en cas de déchirure par apposition au verso d’un papier de conservation réalisé avec une colle cellulosique qui garantit la réversibilité, doublage en plein par un papier japon dans les mêmes conditions, comblage des lacunes par réintégration de pulpe de papier, réencollage à l’aide de colles cellulosiques pour protéger le document des pollutions futures.


Les plans ont été ensuite conditionnés sous pochette polyester, plastique chimiquement stable et très résistant, qui permet une manipulation plus aisée du document tout en le protégeant.
Les différentes interventions prévues et les matériaux utilisés ont été fixés dans un protocole de restauration accompagnant les devis. La Ville de Reims a confié les opérations à deux entreprises professionnelles, les Etablissements Ardouin et l’Atelier Quillet, pour un coût global de 19 888 euros, financé en 2001 et 2002 dans le cadre du contrat de plan.
Une campagne de numérisation a succédé en 2003 à la campagne de restauration.
Tous les plans ont été numérisés et leur consultation se fait aujourd’hui sur écran en salle de lecture.
Chacun d’entre eux a fait l’objet d’une indexation qui permet un accès direct à partir d’un nom de lieu, d’un nom de personne, d’une date ou d’un mot-matière.
A terme, il est envisagé de les mettre à la disposition des internautes sur le futur site des Archives municipales et communautaires, sur lequel une réflexion est en cours.

Sylvie Nélis,
Directrices des Archives municipales de Reims